Ô Poirion, entre réinsertion professionnelle et circuits courts

Saint-Sauvant, Vienne. 1300 habitants. 1 épicerie, 1 pharmacie, 1 poste, 1 Foyer logement pour personnes âgées. Quand en 2012 le seul restaurant du village ferme ses portes, on se bat. On réunit l’association locale, solidarité environnement insertion (SEI) et on se mobilise pour sortir de terre Ô Poirion, petit ovni gastronomique de développement rural. Ce restaurant allie cuisine locale et réinsertion professionnelle sous les mantras de la réduction du gaspillage alimentaire et du circuit court.

En cuisine, huit cuistots et serveurs s’affairent sous les yeux vigilants de l’encadrante qui les forme. Ils préparent les plats à l’aide de produits bruts issus d’une dizaine de fermes locales. Ici, rien n’est perdu. Le taux de gaspillage est proche de zéro. La chef détaille le menu : « Ce chutney a été élaboré avec des poires blettes et ces rillettes ont été cuisinées à partir de cuisses de canards qui n’avaient pas été consommées précédemment. Une cellule de refroidissement ultrarapide nous aide à conserver des repas préparés du jour et non consommés. Ils alimentent la cantine du lendemain pour les autres salariés de l’association ». Ouvert depuis février 2016, la structure est unique en France.

Dynamiser l’accès à l’emploi localement

Pendant deux ans, les salariés se forment en cuisine ou en salle. « Nous mettons en situation de travail des personnes qui peuvent avoir passé plusieurs années sans emploi. Ici, nous sommes à 12 km de l’auto-école, à 40 km du pôle emploi… Sans permis ou sans voiture, il est difficile de s’en sortir » explique la directrice Amélie Closse. Ô Poirion propose ainsi à ses salariés un service de location de voiture et de scooter à la demi-journée et des séances de cours de codes. A 39 ans, Valérie cherchait du travail depuis un an avant d’être recrutée ici en tant que cuisinière puis serveuse. « Je découvre les métiers de la restauration. C’est un rythme sympa et tout le monde s’entend bien. Le cdd fini je retournerai peut-être en Charentes-Maritimes, près de ma famille. Je vis au jour le jour, je ne me projette pas». Brandon , lui, « à part un chef relou », taquine-t-il, est content de son boulot. Du coin, il était apprenti en CAP cuisine avant que sa formation ferme et le contraigne à faire des petits boulots saisonniers. Ouvert depuis février 2016, le restaurant a d’autres projets plein les tiroirs. Amélie détaille : « Nous organisons une Ruche qui dit oui, on réfléchit à y installer un café librairie, une ludothèque…»

 

Association solidarité environnement insertion (SEI)

L’association du village de Saint-Sauvant, créée en 2011 par ses habitants, œuvre à dynamiser la commune et l’emploi dans cette zone rurale sinistrée, au taux d’imposition le plus bas du département. Avec ses 6 permanents et ses 18 salariés en parcours d’insertion, SEI a ainsi lancé plusieurs chantiers d’insertion en bâtiment, dans la réhabilitation de bâti et en entretien d’espaces verts, de berges de rivières… Des métiers valorisants, pourvoyeurs d’identité.

Portée par une trentaine de bénévoles de la commune, l’association vante ses 30 à 35% de réussite de retour à l’emploi des salariés en parcours d’insertion, contre 20% en moyenne nationale pour ce type de structure.

Les travaux de réhabilitation du restaurant ont été financés par le Conseil régional à 35%, FEADER à 12%, Conseil départemental à 3%, Direction du travail à 3%, fonds privés à 18%, emprunts pour 30%. Ils bénéficient d’une exonération de TVA et une souscription locale leur a donné 5 000 euros !

L’association dans son fonctionnement est financée par le département de la Vienne et les services de l’Etat dans le cadre des politiques publiques de l’emploi ainsi que par les prestations qu’elle réalise.